Enregistrer un CD d'arias de Mozart, dans le contexte discographique hautement compétitif d'aujourd'hui, signifie une prise de risque absolue. Aussi est-il d'autant plus appréciable que la soprano colorature française Géraldine Casey remplisse plus que les attentes.
Casey se situe dans la lignée des meilleures en la matière (sujet, métier), comparable à une Arleen Augér, mais avec un élément décidément plus dramatique dans la voix. Chaque son est plein, assuré (même chez la Reine de la nuit), et elle sait apporter à chaque aria son atmosphère particulière.
L'expressivité et l'émotion sont entièrement contrastées dans les huit extraits présents sur ce disques, de « La Finta Giardiniera » à « Lucio Silla », de « Zaïde » au « Directeur de Théâtre », et jusqu'aux deux grands airs de Konstanze et le 1er air de la Reine de la Nuit. Un programme plus qu'ambitieux, mais Casey sait toujours convaincre - plus que certains « grands noms » d'aujourd'hui.
Jusque dans la fine ironie de Mademoiselle Silberklang, qui pourrait éventuellement être discutée, le niveau est au plus haut. Mady Mesplé, Reri Grist, Edita Gruberová : musicalement, Casey laisse toutes les dames citées derrière elle. Dans l'Air de concert "Nehmt meinen Dank" KV.383, elle est même absolument égale à la grande Lucia Popp, en outre avec beaucoup plus d'ornementations (raisonnables) que sa grande devancière. Seule occasionnellement la langue allemande de la chanteuse semble rencontrer quelques insignifiantes difficultés - un problème qui peut être relevé malheureusement de plus en plus en matière d'opéra allemand.
L'Orchestre Philharmonique de Constance, en activité depuis 1932 et qu'on avait jusqu'ici eu peu l'occasion d'entendre, livre une exécution remarquable. Malheureusement, il manque à son chef d'orchestre permanent Vassilis Christopoulos, né en 1975 à Munich, l'expérience et une lecture nouvelle de Mozart (rubati très recouvert dans l'aria "Martern", certains phrasés et certaines conclusions qui ne sont plus d'usage depuis longtemps).
Non que ses interprétations soient dénuées d'inspiration ou de force - les Ouvertures du « Directeur de Théâtre » et de la « Finta Giardiniera » égalent vraiment les meilleurs enregistrements des années 80, et sa Marche des Prêtres de la « Flûte Enchantée » se distingue agréablement par des tempi non déplacés. Mais Christopoulos est encore jeune et ainsi on lui pardonne volontiers de plus petites gaucheries. Il sera bon d'entendre dans l'avenir ce jeune chef d'orchestre laisser derrière lui certains "vieux démons" d'énergie et de charme.